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"Nous sommes en présence d’une identité manifeste (...)"

La ceinture fléchée renouvellée

mercredi 12 mai 2010

Texte publié dans l’Action nationale

Par Simon Beaudry et Philippe Jean Poirier

Le peuple québécois a cela d’excessif : soit il se vautre dans l’Histoire, pour trouver la source de tous ses malheurs, soit il renie tout, oublie, passe à autre chose. Il en va de même pour ses objets identitaires. La ceinture fléchée fût jadis un morceau de vêtement convoité, chéri, utile, et signifiant. Il est devenu aujourd’hui objet de raillerie. « Il ne lui manque que la ceinture fléchée ! » est l’insulte suprême pour rabaisser tout nationaliste suspect.

Pourquoi cela ? Ne serait-il pas possible d’atteindre une plus grande sérénité face à notre histoire, notre culture, notre folklore et nos symboles identitaires ? Ne devrait-on pas oeuvrer à la réactualisation de nos symboles, quelqu’ils soient, plutôt que de s’en débarasser ? C’est ce que pensent les créateurs du collectif Identité québécoise.

Poursuivant un travail de réflexion amorcé avec les réactualisations du drapeau et du patriote québécois, le collectif Identité québécoise choisit cette fois de s’intéresser à la ceinture fléchée traditionnelle dite de l’Assomption.

Nous proposons :

1- Que l’État du Québec officialise la ceinture fléchée traditionnelle dite de l’Assomption comme véritable symbole national. 2- De créer une version modernisée de cette ceinture afin qu’elle redevienne un item populaire et « portable » au quotidien. 3- D’offrir, à qui veut l’apprendre, un enseignement professionnel permettant la confection artisanale de sa propre ceinture fléchée renouvellée telle que proposée plus loin dans ce texte ou la possibilité de s’en procurer une.

Québec est une ceinture fléchée

La ceinture fléchée, à la lueur de son passé et de son présent, constitue un véritable symbole national, capable de nous représenter pour l’avenir. Elle a tout ce qu’il faut pour représenter la nation québécoise et son territoire. Sa composition évoque les sources culturelles qui ont fomenté l’identité québécoise. Elle fait état des savoirs et apports français, anglais et autochtones, tout en évoquant le climat qui a joué un rôle déterminant dans notre établissement. La ceinture fléchée traditionnelle dite de l’Assomption est issue d’une technique de tressage au doigt pratiquée par les peuples des Premières Nations du Nord de l’Amérique, dont les motifs uniques et magnifiques ont été développé et raffiné par des artisanes canadienne-françaises dès le 18e siècle. Désormais résoluement québécois, ce tressage au doigt se différentie de tous les autres types de tressage existant chez les autres peuples du monde.

Du coureur des bois au raquetteur, des personnages d’Henri Julien jusqu’à ceux d’Honoré Beaugrand, du gigueux jusqu’au plus célèbre de nos Bonhommes d’hiver, du Patriote Chénier jusqu’au géant Félix, la ceinture fléchée à toujours su trouver son porteur et se tailler une place dans l’histoire, grâce principalement aux artisan(e)s qui ont tressé son chemin jusqu’à nous, à bout de doigt, de laine et de misère.

En ce qui concerne la symbolique, sa composition graphique suggère plusieurs choses. En voici trois :

1- Le fleuve du Saint-Laurent et ses berges : Le cœur de la ceinture peut d’abord représenter le grand fleuve Saint-Laurent, véritable jugulaire géographique du Québec. Les motifs d’éclaires et de flammes qui se grèffent au coeur fléché sont alors autant de rivières et de fjords qui fendent les terres et se jettent dans le Fleuve.

2- L’épinette noire : Placé à la verticale, le motif rappel le grand épinette noire (de même que la structure de ses épines qui se joignent à la branche) qui trône dans notre forêt, véritable emblème de notre paysage québécois. Cet arbre est un des plus présent sur le territoire et il trouve toute sa noblesse dans la poésie de Miron comme dans l’expérience du territoire par la chasse et le sport.

3- Le peuple québécois, la solidarité et l’avenir :

Le tressage, constitué de brins de laine qui s’entrecroisent et se tiennent ensemble, forme un tout cohérent et représente l’idée de solidarité entre les individus. Les différentes couleurs de brin représentent la richesse culturelle de l’immigration qui n’a cessé de nourrir la nation québécoise et de la faire évoluer. Ce tressage rappelle aussi l’expérience collective de vivre ensemble. Tous les éléments du motif (éclaires, flammes et flèches) pointent dans la même direction et suggèrent l’action, l’avancement, l’évolution. Le fait que cet objet soit fabriqué à la main évoquera toujours le souvenir d’un pays gossé à la main par nos ancêtres, travailleur(euse)s acharné(e)s et patient(e)s.

Voilà donc trois bonnes raisons pour faire de la ceinture fléchée traditionnelle dite de l’Assomption un véritable symbole national québécois, au même titre que le drapeau, l’iris versicolore, le harfang des neiges ou le bouleau jaune.

La ceinture au quotidien

En attendant une réponse politique en ce sens, cet icône national pourrait bénéficier d’une plus grande considération s’il retrouvait une pertinence utilitaire dans notre société actuelle. C’est pourquoi le collectif IQ propose une version « renouvelée » de la ceinture traditionnelle. Nous faisons la proposition d’une ceinture tressée au doigt, mais beaucoup plus mince, afin qu’elle puisse s’inscérer dans les ganses d’un pantalon ou d’une jupe d’aujourd’hui. C’est ainsi qu’elle pourra redevenir un objet utilitaire et « populaire ».

Afin d’amincir la ceinture tout en préservant la symbolique, nous proposons de garder le cœur, mais de le border d’une seule rangée d’éclaires, suivi d’une seule rangée de flammes et de terminer cette ceinture aux bordures par un motif dent-de-scie. La ceinture aurait ainsi 5 centimètres de largeur au lieu des 20 à 25 centimètres que requiert la ceinture fléchée traditionnelle. De plus, notre prototype propose un système d’anneaux commun à plusieurs modèles actuels.

Au delà du symbole, un savoir à préserver

L’idée de départ du collectif avait une visée différente ; nous avions l’intention de fabriquer un modèle reproductible à grande échelle de ceinture fléchée, tissée industriellement, dont le motif aurait été un imprimé. C’est en rencontrant des gens du milieu de la ceinture fléchée que nous avons compris l’importance de la technique et du savoir dans la venue au monde de cet objet identitaire.

Car pour ces artisans, ce n’est pas tant l’objet lui même qu’il fait sauver, mais le savoir unique qui permet sa fabrication.

Le collectif Identité québécoise a décidé qu’il était important d’en tenir compte. C’est pourquoi nous avons non seulement appris nous-même à tresser le fléché, mais nous avons mis sur pied un cours de tressage, développé avec la très précieuse collaboration de Madame Michelle Beauvais, artisane du tressage et professeure à la Guilde des étoffes tressées, chercheure et auteure dont les travaux trouvent lecteurs chez les spécialistes en textile tressé provenant de différentes écoles internationales.

Le cours est proposé en plusieurs scéances et l’enseignement, offert avec l’aide de Marie-Berthe Lanoix-Guilbaut, présidente de l’Association des artisans de ceinture fléchée de Lanaudière et artisane de renom, ainsi que de l’organisme des Vieux métiers. Cet enseignement permettra la production de différents échantillons menant à pouvoir fabriquer soi-même sa propre ceinture fléchée « nouvelle mouture ». Il est possible aussi, pour ceux et celles qui ne veulent pas suivre la formation, de se procurer une ceinture fabriquée par un(e) artisan(e).

Avis à tous les patriotes-artisan(e)s, il est temps de se changer la ceinture.

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